Depuis 2008, les banques centrales ont inondé de liquidités les marchés mondiaux afin de renflouer le système financier et de soutenir la reprise. A première vue, elles semblent avoir réussi à ramener la stabilité même si celle-ci semble plutôt précaire. A chaque fois que ce fragile équilibre est remis en cause, nous avons connu une succession de vagues «risk-on» (appétit pour le risque) et «risk-off» (aversion au risque) de plus en plus puissantes qui ont certainement mis à rude épreuve la tolérance au risque des investisseurs. Ce fut le cas en 2010, 2011, 2014 et 2015, lorsque la volatilité du pic de volatilité a atteint des niveaux encore plus élevés qu’en 2008. Par conséquent, dans leurs efforts pour contrôler la volatilité du marché, les autorités monétaires de la planète ont non seulement fait gonfler les prix des actifs, mais également déséquilibré la «volatilité de la volatilité».
Changement de nature de la volatilité?
Si la volatilité a toujours existé sur les marchés, elle a changé de nature ces dernières années: en effet, la volatilité elle-même est devenue plus volatile et ne perdure plus puisque nous faisons face à des accès de volatilité à court terme, suivis de chutes brutales. Ce phénomène s'explique par la combinaison d’une faible volatilité et de faibles volumes, forçant ainsi les investisseurs en quête de rendement à se réorienter vers des actifs déjà «congestionnés» dans un contexte d'illiquidité croissante du marché.
Les régimes de faible volatilité peuvent se prolonger et finir par coûter cher aux investisseurs qui cherchent à couvrir leur portefeuille. A cet égard, il serait utile de paraphraser la citation de John Mayard Keynes: «Les marchés peuvent rester irrationnels plus longtemps que vous ne pouvez rester solvable». En d’autres termes, «la volatilité peut rester (plus) faible plus longtemps que les investisseurs ne peuvent se montrer patients.» Au final, les modèles de comportement consolidés conduiront au retrait (achat) de la couverture d’assurance au pire moment possible du cycle financier. La volatilité peut se révéler la quintessence même du «value trap»*: ces temps-ci, les investisseurs peuvent être attirés par des niveaux historiquement bon marché mais perdre beaucoup en effectuant diverses opérations de portage sur la volatilité. La principale explication de ce phénomène réside dans le fait que de bas niveaux absolus de volatilité sont généralement associés à des niveaux élevés de valeur relative de la volatilité, ces derniers faisant grimper les coûts de portage .
Analyser les risques
«Commencer par une analyse du risque par opposition au rendement, c’est mettre les bœufs avant la charrue (ce qui est normal !). Or, et aussi incroyable que cela puisse paraître, la «charrue du rendement» est devant les bœufs depuis si longtemps que plus personne ou presque ne s’aperçoit qu’il s’agit là d’une anomalie. Le risque étant le moteur de tout rendement, il est raisonnable de se demander quel risque est pris pour viser ce rendement et/ou quelle est la récompense pour le risque encouru.» (Newsletter CheckRisk, août 2015).
Ces dernières années, les grands investisseurs institutionnels ont assisté à l’expansion de cette stratégie qui se focalise sur le risque (volatilité, perte de capital et lacunes de financement), plutôt que sur les indices de référence, et qui procède à l’allocation d’actifs en fonction des primes de style (momentum, «value», volatilité ou portage («carry»)).
La volatilité est devenue un élément utile pour les investisseurs institutionnels car la très grande majorité d’entre eux sont confrontés aux mêmes difficultés pour équilibrer leurs portefeuilles en termes de risque et de rendement. L'ingénierie financière et le recours aux options leur permettent par exemple de modifier la distribution de leurs rendements afin d'améliorer les chances d'atteindre leurs objectifs d'investissement.
En conclusion, peut-être est-il temps de garder une allocation actions – étant donné les niveaux de taux extrêmement bas –, mais sans pour autant subir tout le risque qu’elle représente, et, à cet égard, les stratégies de volatilité peuvent aider à atteindre cet objectif.
*Piège représenté par les valeurs jugées sous-évaluées et considérées à tort comme de solides opportunités d’investissement
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Tommaso Sanzin
Alternative Solutions - Overlay and Quantitative Strategies