La persistance des rendements à très faibles niveaux justifie néanmoins le maintien d'une stratégie d’investissement active, selon une approche globale et non contrainte. L’univers « euro aggregate » semble en particulier vulnérable.
Les incertitudes politiques auxquelles étaient exposés les marchés financiers au printemps ont en grande partie été levées. L'issue de la présidentielle et des législatives en France a été positivement accueillie par les marchés, tandis que les élections anticipées au Royaume-Uni n’ont pas eu d’impact, le processus du « Brexit » se poursuivant comme attendu. Au-delà des résultats, la rhétorique des dirigeants européens est à nouveau positive et l’élection d’Emmanuel Macron en France redonne du souffle au couple franco-allemand. Même si le cas italien est encore susceptible de générer de la volatilité, le pic d’incertitude politique semble bel et bien passé en Europe, et c'est donc une séquence d'accalmie qui s'est ouverte pour les marchés obligataires.
D'autant que l’évolution du régime monétaire des banques centrales occidentales n'est pas, elle non plus, de nature à déstabiliser les marchés. Aux Etats-Unis, la Fed met progressivement en œuvre le relèvement de ses taux directeurs. En Europe, la BCE a annoncé qu'elle ne baisserait pas davantage les siens et a ralenti ses achats d’actifs obligataires. L’hypothèse d’une hausse brutale des taux qui provoquerait un krach obligataire, un scénario encore redouté par de nombreux investisseurs au premier semestre, semble donc écartée et les récentes communications de la Fed et de la BCE ont été globalement conformes aux attentes des marchés.
De fait, la réduction du bilan de la Fed ne fait pas figure de « surprise » aux yeux des opérateurs, même si elle a été évoquée un peu plus tôt qu’attendu. Selon toute vraisemblance, les mesures en vue d’une réduction effective du bilan de la Fed devraient débuter au mois de septembre. La prochaine hausse des Fed Funds pourrait quant à elle être annoncée en décembre. En revanche, l’objectif de trois hausses de taux en 2018 défendu par le consensus paraît élevé. Le pragmatisme impose d'attendre les prochaines réunions du FOMC pour pouvoir se prononcer sur le rythme de la normalisation monétaire en 2018.
Une approche flexible et globale des marchés obligataire pour réduire l’exposition aux risques
Si l’environnement des marchés obligataires s’est éclairci, il ne faut toutefois pas négliger le risque de taux lié aux niveaux encore extrêmement bas des rendements obligataires, en particulier en Europe.
Dans ce contexte, une gestion active reste incontournable pour immuniser les portefeuilles contre une hausse des taux dans le sillage des Etats-Unis, même graduelle. Il est nécessaire de sortir de l’univers euro aggregate afin de trouver d’autres alternatives plus protectrices. Cette configuration plaide en faveur d'une approche globale et non contrainte des marchés obligataires.
A l’image des mois passés, plusieurs thèmes d’investissement sont à privilégier. Ainsi, le crédit américain reste intéressant au regard de son équivalent européen compte tenu de valorisations plus attrayantes. L'incertitude renouvelée sur l’orientation des prix pétroliers pourrait certes constituer un frein pour l’appréciation des obligations d’entreprise américaines. Les cours du baril oscillent actuellement entre 42 à 55 USD, des niveaux comparables à ceux de 2015-2016. La situation est néanmoins différente: l'indice ISM s'affichait alors à 48, et les craintes d’un retour en récession des Etats-Unis constituaient un catalyseur baissier significatif pour le pétrole. Aujourd’hui, la santé de l’économie américaine n'est plus en cause. Les difficultés des pays producteurs à s’entendre sur un ajustement de la production expliquent à elles-seules la faiblesse des cours.
De même, le segment High Yield US, où les rendements en CDS se situent actuellement 70 points de base au-dessus de leur moyenne de 5 ans en carry et roll-down, recèle encore de la valeur. Investir ce segment via des dérivés, à l’instar des CDS, permet d’optimiser le profil de revenu. Les CDS high yield restent en effet peu chers relativement au prix des obligations sous-jacentes auxquelles ils sont adossés.
Enfin, la dette bancaire subordonnée conserve elle-aussi tout son attrait, sous réserve de faire preuve de sélectivité dans le choix des titres. Le récent épisode de Banco Popolare et des banques régionales vénitiennes justifie en effet de se concentrer sur les émetteurs bancaires systémiques, dans la mesure où ces acteurs de plus grande taille ont déjà épuré leur bilan et restructuré leurs activités. En répondant à une approche flexible des marchés obligataires, ces orientations d'investissement sont de nature à faciliter la réduction des risques en portefeuille.
Christel Rendu de Lint
Head of Global & Absolute Fixed Income